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Dossier La voix des Communs

Dossier sur les communs

En 2001, la réalisatrice québécoise Carole Poliquin présentait son documentaire intitulé Le Bien commun - L’Assaut final. Je revois encore très nettement ce fermier canadien poursuivi par Monsanto pour avoir ressemé du colza transgénique breveté qui s’était retrouvé accidentellement dans son champ. Je me souviens également de cet Indien du Mexique qui subissait les conséquences du détournement du fleuve par les firmes d’agro-business américaines qui se sont approprié l’eau. Dernier souvenir en n, cette mère de famille française, atteinte du cancer du sein qui refusait que ses gènes soient considérés comme la propriété d’une compagnie...

Vingt ans plus tard, le rythme des mainmises sur les ressources n’a pas faibli, tout comme la mécanique de brevetage intensif du vivant et des idées offerts en pâture à un système néo-libéral mondialisé jamais rassasié. Et pour cause: il ne peut survivre qu’en confisquant: la terre à ceux qui la cultivent, le droit de reproduire leurs semences à ceux qui défendent une alimentation saine et variée, Internet à ceux qui l’ont rêvé comme un espace absolu de liberté, sans oublier l’eau et tous ces essentiels au bien vivre de l’Humanité...

Les communs, concept protéiforme, est plus que jamais un porte-voix: celui de tous les citoyens qui veulent protéger les ressources, qui réfléchissent ensemble pour mettre en place une gouvernance collective de celles-ci, dans une logique globale d’interdépendance. Presque mille ans plus tôt, certains l’avaient déjà parfaitement compris. Il aura fallu attendre les années 2000 pour que s’opère qu’un véritable retour des communs, grâce notamment, à l’américaine Elinor Ostrom, prix Nobel d’économie en 2009 pour les travaux d’une vie consacrés à comprendre les modalités de gestion réussie des ressources communes.


Plus que jamais, et bien que la lutte soit franchement inégale, la tragédie des communs énoncée par Garrett Hardin1 et réfutée par Elinor Ostrom n’est pas inéluctable. Les dynamiques de ces dernières années et, plus récemment encore, les initiatives pour faire face à la situation inédite que nous venons de vivre mondialement augurent d’optimistes possibles, que ce soit en matière d’agriculture, d’alimentation, de connaissances, de mise en œuvre locale d’une écologie sociale basée sur des dynamiques communalistes et auto-organisées...
Encore faut-il que collectivement, nous nous donnions les moyens de porter cette rupture radicale, que nous nous projetions dans une perspective de profonde mutation sociale, politique et économique a n que la force d’agir en commun dépasse les maladroites tentatives de récupération. Qu’elle soit bien le fait de tous, par tous et pour tous, a n d’entrevoir un «après» plus écologique et plus humain

Pascaline Pavard

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